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Un soleil en été

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… Marta : Mais bien-sûr qu’elle viendra ! Dès qu’elle aura un petit moment de libre, ne te l’ai -je pas dit ? Mais pour elle aussi,  imagine quel plaisir ce serait de rester ici avec nous… avec toi, depuis tout ce temps…Ça fait combien d’années ? tellement, tellement… Ah, mon petit, j’ai l’impression que c’était il y a une éternité … J’ai vu tant et tant de choses… des choses qui … qui ne me paraissent pas vraies. Je ne  l’aurai pas cru, si quelqu’un me l’avait dit, quand j’étais là-bas, à Palma, et que tu montes sous la mansarde… Avec les nids d’hirondelles sous la charpente du toit, tu te souviens ? Qui s’envolaient dans la maison.. tant de fois devant notre visage… et mes beaux pots de basilic à la fenêtre… Et madame Anuzza, madame Anuzza ? Notre petite voisine ? que devient-elle ? 

Micuccio : Eh… (il fait le signe de croix avec deux doigts pour signifier : morte !)

Marta : Morte ? Eh, je m’en doute bien…Elle était déjà bien vieille…plus que moi…pauvre madame Anuzza…avec sa petite gousse d’ail… tu te souviens ? Elle venait avec cette excuse…de lui prêter une petite gousse d’ail, juste quand on passait à table…et…La pauvre ! Et qui sait combien d’autres sont morts hein ? À Palma… Ah! au moins, une fois morts, ils reposent là-bas, dans notre cimetière, avec leur famille… Alors que moi…qui sait où je laisserai mes os…Bon … allez, allez…n’y pensons pas !

(Dorina entre avec le premier plat et s’approche de Miccucio afin qu’il se serve.)

Oh, merci Dorina…

(Miccucio regarde Dorina, puis tante Marta, confus, gêné ; il lève les mains pour se servir, voit qu’elles sont sales du voyage et les baisse, plus confus que jamais.)

Ici, ici Dorina ! Je m’en occupe… C’est moi qui vais le servir… (elle s’exécute) Comme ça…ça ira, hein ?

Extrait de Limettes de Sicile de Luigi Pirandello.

L’étau, Limettes de Sicile, Le devoir du médecin, trois pièces nouvellement traduites par Mathilde Dri, s’inscrivant dans le premier volume de l’intégrale du théâtre de Luigi Pirandello (en cours de traduction) que nous sommes heureux de présenter.

Hommage

Hommage à notre ami Jean-Philippe Goldschmidt.

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Nous insérons cette courte réplique dans notre hommage, en souvenir des soirées passées à rire ensemble devant,
entre autres films, La Grande Vadrouille, de G. Oury

Il était fort en gueule, colérique, érudit et grand gourmand ; insatiable lecteur, il aimait Victor Hugo et aussi Flaubert dont il affectionnait leur 8 mai commun ; il avait une mémoire insondable, ce qui, pour un professeur d’Histoire-Géographie agrégé lui conférait une aura particulière mais il était surtout et avant-tout notre Ami.

Infatigable, même au plus fort de sa maladie, il n’aura eu de cesse que nous partagions les connaissances d’une idée commune entre nous, de la culture et de la pensée française, jamais très loin d’une certaine Allemagne meurtrie, pays de son père.

Traduisant scrupuleusement, non sans bons moments entrecoupés de fous-rires, le livret de R.Wagner, Tristan et Isolde qui devait s’inscrire dans un vaste ouvrage consacré à la légende quasi mythologique de Tristan et Iseult mais qui ne put aboutir, rédigeant avec cette verve qui lui était propre une préface au texte de Victor Hugo sur Napoléon le Petit, dressant des topos historico-géographiques d’un nouveau concept liés à son amour de l’Antiquité romaine, à son goût de l’Histoire et du présent… il a été un allié sans faille.

« Le Grand Boulamatari l’a finalement mangé » durant une nuit de ce février, sans faire de bruit, dans un affreux silence survenu quelques jours plus tôt. Il a rejoint le panthéon que nous avions dressé ensemble durant nos interminables discussions, en hommage à nos illustres disparus dont nous citions si plaisamment les noms et les œuvres : J. Le Goff… Rabelais… D’Aubigné…Voltaire… Aragon… Hugo… Louise Michel… Jean de la Fontaine et Charles Péguy… la liste est longue et rassurante à laquelle il participe maintenant et tant que les mémoires bienveillantes dureront.